15 doctorants algériens et français seront chargés de l’étude des archives de la période coloniale.

drapeauxCosigné par le Pr Mohamed Lahcen Zeghidi et le Pr Benjamin Stora, le communiqué final ayant sanctionné la réunion de la commission mixte algéro-française d'historiens, revient sur divers aspects déjà abordés à Constantine. Réunis le 25 janvier dernier aux Archives nationales de Paris, les historiens des deux pays ont déblayé le terrain et mis en lumière certaines propositions censées être suivies d'effets. Sur le sujet des archives, ils ont confirmé «ce qui a été décidé à Constantine, à savoir: la restitution de 5 mètres linéaires d'archives de l'Algérie à l'époque ottomane ainsi que la remise de 2 millions de documents numérisés des archives nationales d'outre-mer», rapporte le document rendu public, hier. Chargée par les deux présidents, Tebboune et Macron, de plancher sur l'aspect mémoriel de la colonisation française en Algérie, cette instance centrale du dialogue algéro-français ne semble pas s'être fixée de tabous. Il reste que son travail sera apprécié à la hauteur de la mise en oeuvre de ses préconisations.


Entre autres dossiers ouverts, les membres de la commission ont eu à prendre connaissance et adopter la proposition algérienne d'«une liste ouverte de biens symboliques comme ceux ayant appartenu à l'émir, à Ahmed Bey et à d'autres personnalités algériennes (à titre d'exemples: l'épée, le burnous, le Coran, la tente et les canons de l'émir, la tente d'Ahmed Bey, la clé et les étendards de Laghouat, les canons, etc.) en vue de leur restitution», lit-on dans le communiqué. Cette demande d'ordre symbolique mais également historique, confère à la réunion de Paris son importance, au sens où la récupération par Alger des effets personnels du fondateur de l'État algérien, a toujours constitué une position de principe de l'Algérie. C'est dire que l'accord des historiens algériens et français sur cet aspect des travaux ouvre des perspectives intéressantes et déblaie le terrain à d'autres dossiers autrement plus complexes.


D'ailleurs, la réunion a surtout concerné les conditions techniques et de faisabilité du débat futur, notamment la mise en place d'une infrastructure à même de permettre aux chercheurs algériens et français de travailler dans les meilleures conditions possibles. À titre d'exemple, le document mentionne l'activation du «processus de réalisation par la mise en oeuvre d'un portail numérique ‘'Bibliothèque partagée'' entre la Bibliothèque nationale de France et la Bibliothèque nationale d'Algérie». Pour les historiens, «cette ‘'bibliothèque partagée'' pourrait dans un premier temps être portée par la Bibliothèque diplomatique numérique (BDN)». Le communiqué retient que cette infrastructure «permettrait également de lancer un programme pour reconstituer numériquement la correspondance et la bibliothèque de l'émir Abd el-Kader, dont les textes et les ouvrages sont actuellement disséminés dans le monde entier».


Pour donner un prolongement concret au débat mémoriel, la commission mixte «s'est accordée sur le fait que les 15 doctorants et chercheurs algériens en France et doctorants et chercheurs français en Algérie», seront «chargés de participer à l'inventaire et d'étudier les archives de la période coloniale dès la rentrée universitaire prochaine (2024-2025)». Ces chercheurs «devront s'attacher des objets d'étude exclusivement dédiés au XIXe siècle, avec toutes les facilités d'accès aux fonds d'archives», relève la même source.


Sur un autre niveau, «la Commission mixte s'est entendue pour poursuivre l'identification et la recension des cimetières, des tombes et des noms des détenus algériens du XIXe siècle décédés et enterrés en France, et de valoriser ces lieux de mémoire par l'apposition de plaques commémoratives en une douzaine de lieux (Toulon, Pau, Amboise, Sainte-Marguerite, Sète, Agde, Porquerolles, Calvi, Corte, Ajaccio, la Guyane, la Nouvelle-Calédonie)». Enfin, il y a lieu de retenir que cette instance du dialogue algéro-français a visiblement réussi, jusque-là, en ce sens qu'elle a su tenir à distance les voix de l'extrême droite française, propose de se réunir en Algérie dans deux mois et de poursuivre le programme d'échanges et de réunions.