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Premières pages

Les contextes historiques d’une élaboration

Le présent volume rassemble des articles publiés dans les années 1980 à la suite de la soutenance de mes deux thèses de 3ème cycle, l’une en histoire à l’École des Hautes Études en Sciences sociales, l’autre en sociologie à Paris VII1 , où j’ai enseigné cette discipline de 1981 à 1986. Ces deux thèses traitaient de sujets complémentaires : Messali Hadj, père du nationalisme algérien, et les militants des organisations qu’il a fondées.La première a été publiée sous une forme allégée en 19822 .  Dans la seconde thèse, de sociologie, soutenue en 1984 à l’université de Paris 7, j’ai rassemblé systématiquement des données biographiques (dates et lieux de naissance, origines sociales, itinéraires professionnels et politiques...) de tous les dirigeants de l’Étoile nord-africaine (ENA) fondée en 1926, du Parti du Peuple Algérien (PPA) fondé en 1937, et du Mouvement pour le Triomphe des Libertés Démocratiques (MTLD) fondé en 1946, que j’ai pu identifier. Toutes ces données biographiques ont été rassemblées pour la publication d’un dictionnaire biographique paru en 19853 .
 

A la fin des années 1970, et au début des années 1980, période de l’après indépendance algérienne, les travaux sur l’histoire du nationalisme algérien ont connu des développements particulièrement importants. En France, cette historiographie restait mal connue, et les chercheurs restaient très isolés. Les écrits de cette histoire ne circulaient pas, la production historiographique algérienne étant reléguée au rang de littérature de propagande par l’intelligentsia française. Elle se trouvait mêlée aux travaux académiques dirigés par l’Etat algérien, lesquels combinés à la censure ont fait autant de tord à celle-là. Dans le même temps, une certaine filmographie était mise de côté, Le vent des Aurès de Mohamed Lakhdar Hamina ou La bataille d’Alger de Gillo Pontocorvo n’étaient pas diffusés. Pourtant, la connaissance de la période de l’avant guerre d’Algérie, celle de l’avant 1954, progressait par les travaux sur le nationalisme algérien. En dépit de la pratique étatique algérienne, voulant « confisquer » l’écriture de l’histoire.
A partir de 1962, jusqu’en octobre 1988,  domine la volonté d’affirmation nationaliste. Cette phase a été consacrée à légitimer le pouvoir en place et la nation algérienne dans la même conception historique. L’histoire a été massivement utilisée pour justifier le sens d’une orientation étatique. Une histoire officielle s’est édifiée mettant au secret des pans entiers de la guerre d’indépendance4 . Disparaissaient ainsi le rôle des immigrés dans la construction du nationalisme algérien, la mise à l’écart des « berbéristes » et communistes dans les maquis ou l’engagement des femmes dans la lutte nationaliste. Les noms des principaux acteurs de cette révolution ont été effacés, avec pour mot d’ordre : « Un seul héros, le peuple ! ». L’écriture de l’histoire est confiée à des idéologue du parti du FLN, et non à des historiens. Pour Ahmed Benaoum, dernier directeur en titre du CNEH (Centre National des Etudes Historiques), ce centre « tel qu’il a existé n’avait ni hypothèses, ni mission officielle que celle d’écrire et de réécrire une histoire instrumentalisée par le pouvoir politique. »5 Les auteurs des manuels scolaires accordaient une grande importance aux leaders religieux d’Algérie, ou du monde arabe, au détriment des fondateurs du mouvement indépendantiste algérien. Ainsi, jusqu’aux années 1990, Abdelhamid Ben Badis, le leader du mouvement religieux des Oulémas, était présenté comme un acteur central du nationalisme algérien, « homme pieux, convaincus de l’arabité et de l’islamité de l’Algérie »6 . Un manuel de 2AS, lui consacrait ….7 pages, ainsi que son successeur, El Bachir Ibrahimi, avec leurs photographies. La presse officielle comme El Moudjahid ou El Chaab était un vecteur essentiel de propagation d’une histoire officielle. L’universitaire algérien Brahim Brahimi souligne ainsi que « le FLN, détenteur de la légitimité nationale et guide de la révolution algérienne, veille toujours sur la souveraineté nationale. Il s’approprie donc le secteur de l’information pour défendre la souveraineté nationale. »7 Le mode de commémoration de cette guerre provenait de la nécessité de s’imaginer des racines et des origines qui occultaient les pères fondateurs du nationalisme algérien des années 1930 (comme Messali Hadj ou Ferhat Abbas), puis les instigateurs du soulèvement anticoloniale de novembre 1954 (Mohamed Khider, Mohamed Boudiaf, par exemple). Le passé se reconstruisait sans cesse pour structurer un présent où régnait un parti unique. En Algérie, d’autres lignes de mémoire commencent à se dessiner, dans le cours de la tragédie que le pays a connu tout au long des années 1990. La mémoire de cette guerre évolue. L’État perd progressivement le monopole de l’écriture de l’histoire.  
On peut citer trois ouvrages majeurs. Décoloniser l’histoire de Mohamed-Chérif Sahli, paru en 19658  qui s’inscrit dans la logique de Fanon en s’intéressant aux témoignages oraux (contes, chansons, légendes, proverbes) pour contourner les sources écrites, produites  par le colonialisme, en procédant à une critique violent à l’égard de l’orientalisme. Mahmoud Bouayed dans L’histoire par la bande aborde le même type de sources pour contourner l’absence des archives (à Aix). Algérie, nation et société9  de Mostefa Lacheraf, un des leaders arrêtés dans l’avion de 1956 reste d’actualité. Il analyse la conquête de l’Algérie par la France  au travers des deux guerres d’Algérie qui l’ont encadré.
Les voix dissidentes viendront de l’exil, elles s’affirment porteuses de la vérité, ou plus humblement d’autres regards sur la guerre d’indépendance algérienne.  L’assassinat d’Abane Ramdane de Lebjaoui lève le voile sur le meurtre du « Che algérien » dès 1970. Amar Hamdani, dans Le lion des djebels  restitue la figure de Krim Belkacem10 .
On peut, en fait, distinguer pour cette période les historiens selon qu’ils sont en Algérie ou à l’extérieur, les premiers produisant une historiographie nationaliste et les seconds une forme de « contre-histoire ».

1975-1988. L’émergence d’une Histoire critique.

Cette période ne marque pas l’arrêt de la précédente (où domine la propagande et l’histoire officielle portée ar les médias nationaux) mais initie une historiographie critique, s’intéressant particulièrement  aux origines de la guerre d’Algérie ainsi qu’à la figure jusque là évacuée de Messali Hadj.
En Algérie, en 1980, Mahfoud Kaddache publie au SNED sa grande thèse soutenue 1977 sur l’histoire du nationalisme algérien de 1919 à 1954 pour insérer dans le temps long la rupture de la Toussaint 1954. A sa suite, Kamel Bouguessa soutient une thèse sur l’Etoile nord africaine, en 1979 et Omar Carlier publie en 1975 le premier article sur l’ENA et le Parti du peuple algérien. Encore une fois, c’est de l’exil que viennent les travaux les plus critiques. De France, ce sont les travaux de Mohamed Harbi qui irriguent d’abord la critique de l’histoire nationaliste algérienne. Dans Aux origines du FLN11 , il analyse le nationalisme algérien comme un mouvement plébéien, s’opposant ainsi  à la thèse officielle ainsi qu’à celle de Frantz Fanon, qui considéraient les masses rurales comme acteur essentiel de la guerre révolutionnaire algérienne. Il montre le caractère citadin, populiste et interclassiste du mouvement national. Il poursuit cette analyse en la poussant jusqu’en 1962 dans Le FLN : mirage et réalité12 , il déconstruit un autre pilier de la doctrine d’Etat, le mythe de l’unité du peuple bercé d’héroïsme tragique contre la puissance coloniale. Il est le premier à montrer les luttes de pouvoir dans le camp indépendantiste et la construction progressive de la bureaucratie militaire au travers du FLN. Mohammed Harbi publie finalement 115 documents issus de ses propres archives et apportés par d’autres acteurs ou historiens dans Les archives de la révolution algérienne en 1981, avec une préface de Charles Robert Ageron. Des témoignages d’acteurs comme les Mémoires de Messali (Lattès, 1982), ceux d’Hocine Aït-Ahmed en 198213 , la suite des mémoires de Ferhat Abbas14  en 1980 montrent qu’émergent parallèlement un champ de recherche critique et un début de reconstitution du vécu de la guerre. Dans le même temps, les travaux en France et en Algérie ont rendu possible une phase d’accumulation de savoir.

Je me permets de renvoyer à mes travaux sur l’histoire algérienne : la biographie de Messali15 (ma première thèse) en 1982, et mon Dictionnaire biographique des militants nationalistes algériens16  en 1985.
Dictionnaire biographique de militants nationalistes algériens (1988)
jeudi 19 juin 2008.

Des mêmes auteurs
Guy Pervillé
Ce compte-rendu du livre de Benjamin Stora, Dictionnaire biographique de militants nationalistes algériens, 1926-1954. Étoile nord-africaine. Parti du peuple algérien. Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques, préface de Mohammed Harbi, Paris, L’Harmattan, 1985, 404 pages, est paru dans la Revue d’Histoire de la Deuxième guerre mondiale, n°149, 1988, pp. 122-125.

Mais il convient d’insister sur l’apport le plus neuf de cette première partie, qui n’a malheureusement pas été publiée intégralement avec le dictionnaire : la présentation des données sociologiques, historiques et statistiques établies à partir de celui-ci (t. I, partie II).
Reprenant le classement original qu’il a choisi pour répartir ses notices en trois chapitres, Benjamin Stora étudie successivement les Algériens nationalistes en France (de 1926 à 1954), les cadres nationalistes en Algérie (de 1933 à 1954), et les trois courants qui se sont différenciés dans la direction du mouvement de 1946 à 1954.

Le premier chapitre met en évidence la corrélation entre le recrutement des dirigeants de l’Étoile nord-africaine et les régions d’émigration, en particulier la surreprésentation de la Kabylie (notamment de la commune mixte de Fort-National). Dès 1934, la localisation des membres ou sympathisants de l’Étoile en Algérie établit une correspondance entre l’émigration et le développement du nationalisme en Algérie même. L’étude de la répartition géographique et des activités professionnelles des dirigeants montre une majorité de non-salariés, signe d’une « différenciation sociale d’avec la masse de la communauté immigrée ». L’après-guerre apporte des changements dans la direction de la Fédération de France du PPA-MTLD : plus grand équilibre des origines régionales, niveau culturel plus élevé, « entrée en force des étudiants », renversement du rapport entre salariés et non-salariés par l’effondrement de la catégorie des petits commerçants et la remontée des ouvriers qualifiés.

Le deuxième chapitre étudie les implantations locales et régionales du mouvement en Algérie, en liaison avec les itinéraires socio-professionnels des dirigeants. À la veille de la Deuxième guerre mondiale, l’implantation n’est pas encore nationale ; Alger et la Kabylie restent surreprésentés. Mais les déséquilibres s’atténuent surtout à partir de la grande vague de recrutement d’après novembre 1942. Après 1945, « les anciens centres de recrutement fléchissent au profit d’une implantation moyenne étendue à presque toute l’Algérie » (mais avec une prépondérance relative du Constantinois). L’analyse des activités socio-professionnelles révèle un mouvement essentiellement citadin, en grave discordance avec la composition sociale de la masse du peuple algérien ; mais l’inexistence du travail d’organisation des masses rurales ne prouve pas, selon l’auteur, l’inanité du sentiment national dans les campagnes. Les villes, petites et moyennes, voient s’opérer une différenciation entre catégories sociales, avec une majorité de non-salariés et une minorité de salariés, deux groupes eux-mêmes traversés par des clivages entre « petits » et « gros » pour les premiers, entre « qualifiés » et « non-qualifiés » pour les seconds. Benjamin Stora voit se dégager, d’un côté les éléments constitutifs de la nouvelle bourgeoisie algérienne et de l’intelligentsia, de l’autre un ensemble de catégories déclassées (salariés non qualifiés, petits paysans, artisans et commerçants).

Le troisième chapitre, peut-être le plus important, propose des éléments d’analyse sociologique pour expliquer la formation des trois tendances qui firent éclater la direction du MTLD en 1954 : la majorité du Comité central (les « centralistes »), les membres du Conseil national de la Révolution « messalistes » et les chefs « activistes » fondateurs du FLN (« groupe des 22 » et « comité des 9 »).

La comparaison des lieux de naissance des dirigeants montre que les membres du Comité central de 1946 à 1953 étaient originaires de toutes les régions (sauf les territoires du Sud), avec une relative prépondérance d’Alger. Les messalistes étaient plus fortement implantés dans l’Algérois, l’Oranie et le Sud, mais moins dans le Constantinois et la Kabylie. Au contraire, les activistes avaient pour bastion le Constantinois (la Kabylie étant sous-représentée du fait de l’entrée tardive de ses chefs dans le groupe des fondateurs du FLN).

Les origines sociales des membres du Comité central de 1946 à 1953 montrent une majorité d’origines rurales, mais une faible représentation paysanne ; l’entrée au PPA-MTLD marque plutôt une rupture avec le milieu d’origine. Un autre fait majeur est l’entrée en force des intellectuels et des étudiants (17 sur 32 membres du Comité central élu par le Congrès d’avril 1953) qui refoulent les autres responsables vers les organes d’exécution. Parmi les non-salariés, les professions libérales sont équilibrées par les petits commerçants et artisans (meilleurs porteurs de l’idéologie populiste caractéristique du messalisme, selon l’auteur). Parmi les salariés prédominent les salariés qualifiés, employés et fonctionnaires, ouvriers qualifiés, tous dotés d’un niveau d’instruction relativement élevé. En somme, les plébéiens ont progressivement perdu du terrain au profit des « couches moyennes », ce qui traduit un décalage par rapport à la réalité algérienne, et permet de saisir la crise du MTLD en terme d’enjeux sociaux.

En effet, la comparaison des directions messaliste et activiste avec l’ensemble du Comité central de 1946 à 1953 est instructive. Celles-ci ont en commun une plus forte proportion de salariés (62 % chez les activistes, 55 % chez les messalistes, 31 % dans le Comité central) et une plus faible représentation des catégories « bourgeoises » (20,6 % du Comité central, 10 % des messalistes, 6,2 % des activistes). Ces deux courants sont donc plus proches l’un de l’autre que des « centralistes », ce qui conduit à s’interroger sur les facteurs de la différenciation ultérieure du FLN et du MNA.

Les trajectoires politiques des membres des trois directions présentent des points communs : l’instruction par l’école française, le service militaire, l’adhésion souvent précoce au parti ou à une organisation parallèle, la répression. Mais une différenciation s’opère par l’âge, les traditions et l’expérience politique : Messali est le seul dirigeant qui ait connu toute l’histoire du mouvement depuis sa fondation en 1926. Les dates d’adhésion permettent de distinguer trois générations, marquées par trois grandes séquences d’événements :
  • celle de la Grande Guerre, qui fut celle des pionniers de l’Étoile en France ;
  • celle qui rejoignit le mouvement en Algérie à l’époque du Front populaire et du Congrès musulman ;
  • celle qui subit l’empreinte de la Deuxième guerre mondiale et des massacres de mai 1945.
Trois générations qui n’ont pas gardé les mêmes souvenirs du passé et n’en ont pas tiré les mêmes leçons, sans que l’âge soit le seul critère de différenciation. En 1954, les dirigeants messalistes ont de 56 ans (Messali) à 22 ans ; la plupart ont connu les débuts de l’Étoile et sa longue lutte pour imposer son programme indépendantiste aux autres tendances musulmanes. Les chefs activistes s’échelonnent de 26 à 42 ans ; seul le plus âgé (Mohammed Khider) a connu l’Étoile en 1936 ; tous sont des anciens de l’OS, hantés par l’impératif de la lutte armée. Les centralistes sont en position intermédiaire par leur âge (de 26 à 47 ans). Beaucoup ont connu l’Étoile ou le PPA d’avant 1939 ; mais leur mémoire privilégie les tentatives de rassemblement de préférence aux affrontements. Aussi n’est-il pas étonnant que 76 % des membres du Comité central soient passés au FLN, contre 11 % seulement au MNA.

En conclusion, l’auteur souligne la fragilité de la cohésion de la direction nationaliste, minée par la perte progressive des traditions de l’Étoile et par une profonde modification de sa base sociale. Il insiste encore sur le poids des particularismes régionaux et sur la nature même de l’organisation, à la fois « plébéienne » et « interclassiste ». C’est elle qui empêche le PPA-MTLD d’analyser clairement les différenciations de classes au sein du « peuple » algérien et du parti lui-même. La référence commune au « peuple » masque les enjeux sociaux des luttes de tendances, jusqu’à l’éclatement du parti et au déclenchement de l’insurrection.


1988-2004. Histoire en temps de guerre.

La montée de l’islamisme et de la violence, la rupture du processus démocratique et la guerre qui l’a suivi, les massacres ont soulevé de nombreuses questions sur la nation algérienne et les structures de l’Etat-parti. On assiste à la multiplication des témoignages, des récits, du vécu et ainsi à la diversification des sources pour questionner la guerre d’Algérie afin de comprendre le présent.
Tout d’abord, une série d’ouvrages généraux continuent la déconstruction des mythes officiels et avancent dans la compréhension des répercussions de la guerre d’Algérie dans les événements des années 1990. Harbi publie L’Algérie et son destin : croyants ou citoyens17 en 1993 et confronte les questions de l’arabité, de l’islam et de la citoyenneté. L’explosion du mouvement berbère permet aussi de re questionner la guerre d’Algérie, ainsi l’ouvrage de Ouardane ?  Le mouvement berbère et la guerre d’Algérie. Omar Carlier revisite la guerre d’indépendance comme une guerre de djihad dans Entre nation et djihad18 en 1995. Fanny Colonna pose la question du religieux et de la violence. La majeure partie de ces livres est entrée en Algérie à partir de 1990, ayant attendu d’être traduit, par piratage, création de maisons d’édition privées, par voie de presse, laquelle se développe nécessairement à partir de sa libéralisation et du multipartisme. L’Etat algérien perd progressivement le monopole de l’écriture de l’histoire en Algérie, la censure même n’a plus de prise avec l’émergence d’internet, celui-ci ne peut plus adopter qu’une position défensive.
En ce qui concerne les mémoires, la profusion de récits atteint un seuil inégalé, des auteurs comme Benyoucef Ben Khedda, Salha, Reda Malek (L’Algérie à Evian19), Mohammed Harbi (Une vie debout20), Mohamed Ben Yahyia (La Conjuration au pouvoir) donnent des points de vue et des récits de vie de leaders et des militants de base. Des travaux comme ceux de Djamila Amrane, qui fait publier sa thèse sur les femmes et la guerre d’Algérie21  en 1991, ou de Ali Kafi (publié en arabe et pas encore traduit) continuent de bouleverser les perspectives d’approche historiographiques de la guerre d’Algérie.
On observe le même type de mouvement au Maroc, où l’historiographie avance sur la critique de la construction nationale, au travers de thèses iconoclastes sur la guerre du Rif, la berbérité, le rôle de Ben Barka dans l’Istiqlal, la collaboration des nationalistes avec la France.
En 1984, un ouvrage collectif dirigé par Benjamin Stora et Mohammed Harbi apporte en mars 2004 la contribution de trente historiens dont cinq Algériens pour l’histoire de la guerre d’Algérie22 . La citation qui présente cet ouvrage semble synthétiser cette dernière période :
« L’écriture de l’histoire de la guerre d’Algérie ne fait que (re) commencer ».

 
 
 
 
 
 [1]Sociologie du nationalisme algérien, t. I : Analyse des rapports sociaux, approches biographiques ; t. Il : Dictionnaire biographique de militants nationalistes algériens (1926-1954), thèse de 3ème cycle de sociologie, multigraphiée, Université de Paris VII, 1984, 226 et 302 pages
[2]Benjamin Stora, Messali Hadj, pionnier du nationalisme algérien (1898-1974), Paris, Le Sycomore, 1982, 300 pages. Réédition Hachette, collection « pluriels », 2004. Thèse sous la direction de Charles Robert Ageron, Messali Hadj, biographie. Cette thèse a été soutenue en mai 1978 à l’EHSS. 402 pages.
 
[3]Dictionnaire biographique de militants nationalistes algériens, 1926-1954. Étoile nord-africaine. Parti du peuple algérien. Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques, préface de Mohammed Harbi, Paris, L’Harmattan, 1985, 404 pages. Dans le compte rendu de cet ouvrage, l’historien Guy Pervillé notait : « On doit saluer l’audace du projet - qu’on aurait pu croire trop ambitieux pour un seul chercheur - et l’ampleur de sa réalisation, qui a fourni 600 notices (et 350 autres réservées pour un ouvrage sur la période 1954-1962) à partir d’un index de 2.000 noms. ( …..)  Ce résumé trop sommaire ne vise qu’à donner une idée du travail accompli par Benjamin Stora, qui représente un progrès notable dans l’étude du nationalisme algérien. Celui-ci a le mérite de ne pas avoir accepté sans examen, ni les mythes simplificateurs du populisme, ni même les facilités de schémas marxistes préconçus. Maints détails de ses notices pourront être critiqués et corrigés, mais l’ampleur même de son travail donne du poids à ses conclusions. Il nous démontre notamment une vérité qui apparaissait déjà intuitivement : que le mouvement national n’était pas un échantillon statistiquement représentatif de l’ensemble du peuple algérien. Cette constatation conduit à remettre en cause la conception longtemps dominante dans l’historiographie algérienne ou sympathisante, selon laquelle seul « le peuple agit et parle », au profit d’une « interrogation sur la notion d’avant-garde » et sur les « rapports entre mouvement spontané et mouvement organisé ». Cette réhabilitation du rôle des hommes et des organisations n’est pas une mince leçon ».. Ce compte-rendu a été publié une première fois dans l’Annuaire de l’Afrique du Nord 1984 (rubrique Histoire), rédigé en 1985 et publié en 1986.
 
 
[4]Pour un approfondissement de cet aspect, occultation et falsification, je renvoie à mon ouvrage, La gangrène et l’oubli, la mémoire de la guerre d’Algérie, Paris, La Découverte, 1991, poche, 1998.
[5]Cité par Hassan Remaoun et Gilles Manceron, D’une rive à l'autre, la guerre d’Algérie de la mémoire à l’histoire, Paris, Ed Syros, 1992.
[6]Khaldia Bentahar, Analyse des manuels scolaires en Algérie et leur apport dans la formation de la mémoire historique, mémoire de DEA, Paris 7, 1998.
[7]Brahim Brahime, Le pouvoir, la presse et les droits de l’homme, Alger, Ed Marinoor, 1996.
[8]Sahli, Mohamed-Chérif, Décoloniser l’histoire, Introduction à l’histoire du Maghreb, Maspero-SNED, 1965.
[9]Lacheraf, Mostefa, Algérie, nation et société, Maspero- SNED, 1976.
[10]Amar, Hamdani, Le lion des djebels, Balland, 1973
[11]Harbi, Mohamed, Aux origines du FLN, Bourgois, 1975.
[12]Harbi, Mohamed, Le FLN : mirage et réalité, Jeune Afrique, 1980.
[13]Aït Ahmed, Hocine, Mémoires d’un combattant, Messinger, 1982.
[14]Abbas, Ferhat, Autopsie d’une guerre, Garnier, 1980.
[15]Stora, Benjamin, Messali Hadj, Pionnier du nationalisme algérien, Sycomore, 1982.
[16]Stora, Benjamin, Dictionnaire biographique des militants nationalistes algériens, 600 portraits, L’Harmattan, 1985.
[17]Harbi, Mohamed, L’Algérie et son destin : croyants ou citoyens, Arcanter, 1993.
[18]Carlier, Omar, Entre nation et Djihad, Histoire sociale des radicalismes algériens, Presses de Sciences Po., 1995.
[19]Malek, Reda, L’Algérie à Evian, Le Seuil, 1995.
[20]Harbi, Mohamed, Une vie debout, vol. 1., La Découverte, 2001.
[21]Amrane, Djamila, Les femmes algériennes dans la guerre, Plon, 1991.
[22]Stora, Benjamin et Harbi, Mohamed (dir.), La guerre d’Algérie,1954-2004, la fin de l’amnésie, Laffont 2004.
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[1] Sociologie du nationalisme algérien, t. I : Analyse des rapports sociaux, approches biographiques ; t. Il : Dictionnaire biographique de militants nationalistes algériens (1926-1954), thèse de 3ème cycle de sociologie, multigraphiée, Université de Paris VII, 1984, 226 et 302 pages

[1] Benjamin Stora, Messali Hadj, pionnier du nationalisme algérien (1898-1974), Paris, Le Sycomore, 1982, 300 pages. Réédition Hachette, collection « pluriels », 2004. Thèse sous la direction de Charles Robert Ageron, Messali Hadj, biographie. Cette thèse a été soutenue en mai 1978 à l’EHSS. 402 pages.

[1] Dictionnaire biographique de militants nationalistes algériens, 1926-1954. Étoile nord-africaine. Parti du peuple algérien. Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques, préface de Mohammed Harbi, Paris, L’Harmattan, 1985, 404 pages. Dans le compte rendu de cet ouvrage, l’historien Guy Pervillé notait : « On doit saluer l’audace du projet - qu’on aurait pu croire trop ambitieux pour un seul chercheur - et l’ampleur de sa réalisation, qui a fourni 600 notices (et 350 autres réservées pour un ouvrage sur la période 1954-1962) à partir d’un index de 2.000 noms. ( …..)  Ce résumé trop sommaire ne vise qu’à donner une idée du travail accompli par Benjamin Stora, qui représente un progrès notable dans l’étude du nationalisme algérien. Celui-ci a le mérite de ne pas avoir accepté sans examen, ni les mythes simplificateurs du populisme, ni même les facilités de schémas marxistes préconçus. Maints détails de ses notices pourront être critiqués et corrigés, mais l’ampleur même de son travail donne du poids à ses conclusions. Il nous démontre notamment une vérité qui apparaissait déjà intuitivement : que le mouvement national n’était pas un échantillon statistiquement représentatif de l’ensemble du peuple algérien. Cette constatation conduit à remettre en cause la conception longtemps dominante dans l’historiographie algérienne ou sympathisante, selon laquelle seul « le peuple agit et parle », au profit d’une « interrogation sur la notion d’avant-garde » et sur les « rapports entre mouvement spontané et mouvement organisé ». Cette réhabilitation du rôle des hommes et des organisations n’est pas une mince leçon ».. Ce compte-rendu a été publié une première fois dans l’Annuaire de l’Afrique du Nord 1984 (rubrique Histoire), rédigé en 1985 et publié en 1986.

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